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Co gérant : formes de sociétés concernées, règles et points clés

Publié le : 8 septembre 2025Dernière mise à jour : 21 septembre 2025Par

On entend souvent tout et son contraire sur la co-gérance. Certains y voient un duo complémentaire, d’autres une source de blocage. La vérité se niche dans les statuts et dans la pratique. Un co gérant n’est pas un codirigeant comme un autre.

J’ai accompagné des associés qui s’entendaient à merveille… jusqu’au premier conflit de priorités. Ce jour-là, les clauses statutaires se révèlent utiles ou cruelles. Quand elles sont claires, la co‑gérance fluidifie la vie sociale. Quand elles sont floues, tout ralentit.

La co-gérance n’existe pas dans toutes les formes de sociétés. Elle concerne surtout celles où la loi parle de “gérant”. C’est là que tout commence : comprendre le périmètre, puis organiser les pouvoirs et les contre‑pouvoirs sans caricature.

Je vous propose un tour précis du cadre et des bonnes pratiques, avec des exemples vécus, des écueils fréquents et quelques astuces qui font gagner du temps, des nerfs, et parfois beaucoup d’argent.

Co gérant : définition et périmètre réel

Dans les sociétés dotées d’un organe de gérance, chaque gérant peut être nommé seul ou à plusieurs. On parle alors de co‑gérance. Un co gérant a, par principe, les mêmes pouvoirs qu’un gérant unique, sauf limitation statutaire ou décision des associés.

En pratique, les co‑gérants agissent séparément pour les actes de gestion courante. Les limitations internes sont souvent inopposables aux tiers de bonne foi. Autrement dit, l’entreprise reste engagée, et le différend se règle entre les co‑gérants, éventuellement devant les associés.

Attention au vocabulaire. Dans une SAS ou une SA, on ne parle pas de gérance, mais de présidence, direction générale ou conseil. Écrire “co gérant” pour une SAS est un abus de langage. La co‑gérance est plutôt l’affaire des SARL, SCI ou SNC.

La force de la co‑gérance, c’est la réactivité à deux, avec des compétences complémentaires. Sa faiblesse, c’est le risque de décision contradictoire ou tardive si les règles de signature ne sont pas calibrées. L’anticipation statutaire vaut de l’or.

J’ai vu des duos s’organiser par domaines. L’un gère l’opérationnel, l’autre la finance et les RH. Cette répartition non écrite fonctionne tant que la confiance est totale. Dès qu’un sujet sensible surgit, seul un cadre écrit protège vraiment.

Rappel utile : la loi encadre la révocation des gérants. Un co gérant peut être révoqué dans les mêmes conditions qu’un gérant unique, avec le même enjeu de “justes motifs” et de respect des formes, sous peine de contestations coûteuses.

Quelles formes de sociétés concernées par la co-gérance ?

La co‑gérance existe dans les sociétés où la loi prévoit un ou plusieurs gérants. Concrètement, les SARL et SCI sont en tête de liste. En SNC et SCP, elle est également possible. À l’inverse, SAS et SA fonctionnent avec d’autres organes.

Dans mon cabinet, c’est en SARL que le sujet revient le plus. La structuration du pouvoir est souple, la pratique bancaire connue, et les statuts types sont faciles à adapter. Un co gérant y trouve un cadre robuste, encore faut‑il l’ajuster aux enjeux.

Forme Organe Co‑gérance possible Particularités utiles
SARL / SELARL Gérant(s) Oui Limitation de pouvoirs inopposable aux tiers de bonne foi; calcul de majorité en co‑gérance impacte le statut social.
SCI / SCM Gérant(s) Oui Souplesse statutaire élevée; très courant en immobilier familial ou professionnel.
SNC / SCP Gérant(s) Oui Responsabilité des associés plus étendue; vigilance sur les pouvoirs et assurances.
SAS / SASU Président, DG Non (pas de gérance) Possibilité de co‑direction via plusieurs DG; organisation libre par statuts.
SA Président, DG ou Directoire Non (pas de gérance) Gouvernance lourde; autres mécanismes de partage du pouvoir.

En SCI, la co‑gérance rassure souvent les familles. Chacun signe les baux, suit les travaux, arbitre les ventes. Le revers, c’est l’inertie quand deux visions s’opposent. Là encore, clarifier qui tranche et sur quels montants change la donne.

Dernier point de périmètre : les conventions bancaires. Beaucoup d’établissements exigent une règle de double signature au‑delà d’un seuil. Cette pratique est saine, mais elle ralentit l’exploitation si le seuil est trop bas pour l’activité visée.

Nomination, pouvoirs et limites efficaces des co-gérants

La nomination peut intervenir dès la constitution ou par décision ultérieure des associés. Un co gérant est inscrit au RCS, avec publication légale et dépôt des pièces. Le procès‑verbal doit préciser les modalités de la co‑gérance et la durée du mandat.

Sur le papier, chacun peut engager la société pour les actes entrant dans l’objet social. Pour le reste, on prévoit des garde‑fous. Les limitations internes protègent l’intérêt social, mais n’évitent pas toujours l’engagement vis‑à‑vis des tiers de bonne foi.

Voici les questions que je pose avant toute rédaction de statuts en co‑gérance :

  • Quels actes nécessitent une double signature au‑delà d’un seuil chiffré ?
  • Quels sujets requièrent l’accord préalable des associés (cession, emprunt, garantie) ?
  • Comment répartir les domaines de responsabilité opérationnelle, sans créer de silos ?
  • Quel mécanisme de tie‑break en cas de désaccord persistant entre co‑gérants ?

Un co gérant doit connaître la règle d’opposabilité. Si les statuts limitent ses pouvoirs, un tiers de bonne foi peut quand même engager la société par son entremise. Le recours se fait ensuite contre le gérant fautif, ce qui n’arrange pas la trésorerie.

Cas vécu : des co‑gérants avaient prévu une double signature au‑delà de 15 000 €. Un fournisseur a obtenu un bon de commande en dessous du seuil, mais les avenants successifs l’ont fait grimper. Le débat sur l’engagement final a coûté des semaines d’énergie.

Règles de signature et opposabilité

Idéalement, les seuils sont alignés sur la taille de l’entreprise. Un co gérant dans une jeune SARL n’a pas les mêmes marges qu’un dirigeant confirmé avec une ligne de crédit conséquente. Le bon sens, ici, fait gagner du temps et de la confiance.

À noter également : la délégation de pouvoirs. Une délégation claire protège pénalement l’entreprise et organise l’exécution. Mal rédigée, elle crée des angles morts. Je conseille une revue annuelle, avec mise à jour des signatures bancaires et des mandats.

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Statut social et rémunération en co-gérance

Le statut social dépend de la majorité de gérance, calculée collectivement. Si les gérants détiennent ensemble plus de 50 % des parts (en incluant conjoint et enfants mineurs selon les cas), chaque co gérant devient TNS, même s’il ne détient qu’une petite part.

Cette règle surprend. J’ai vu un gérant à 10 % basculer TNS parce que ses deux associés, eux aussi gérants, détenaient la majorité ensemble. Le coût social change, tout comme la protection. Anticiper évite les mauvaises surprises et les recalculs rétroactifs.

À l’inverse, des co‑gérants minoritaires ou égalitaires rémunérés relèvent du régime assimilé salarié, sans assurance chômage. Un co gérant peut donc relever d’Urssaf indépendants ou du régime général selon la configuration, ce qui influe sur la trésorerie et les bulletins.

La rémunération suit la logique habituelle : décision des associés, bulletin ou note de gérance, et cadrage fiscal. La transparence est clé. Les écarts non assumés génèrent des tensions. Mieux vaut écrire une grille de rémunération et de bonus liée aux objectifs communs.

Illustration concrète. Deux co‑gérants, l’un commercial, l’autre technique. Le premier voulait un variable indexé sur les ventes, le second une prime sur la marge. On a mixé les deux et ajouté un plancher trimestriel. Plus simple, plus lisible, plus équitable.

Gouvernance, conflits et bonnes pratiques entre co-gérants

La meilleure co‑gérance tient à trois choses : un cap clair, des rituels de décision, et des clauses de sortie praticables. Un co gérant heureux est un gérant qui sait quand il décide seul et quand il doit décrocher son téléphone.

Je recommande un court pacte d’associés pour compléter les statuts. On y met les zones de veto, les seuils de rachat, et un mécanisme de médiation rapide. Cela coûte moins cher qu’un procès et, surtout, ça évite d’interrompre la marche du business.

“Ce qui abîme une co‑gérance, ce n’est pas le désaccord, c’est l’absence de procédure quand le désaccord survient.”

Côté opération, le duo fonctionne mieux avec des rendez‑vous fixes. Quinze minutes chaque matin pour trier l’urgent, un point hebdo pour l’important, un comité mensuel pour l’orientation. Le cadre rend la liberté plus simple, pas l’inverse.

Enfin, ne négligez pas l’assurance responsabilité civile des mandataires sociaux. Un co gérant expose sa personne en cas de faute de gestion. Une bonne police et des délégations bien écrites réduisent les risques sans alourdir inutilement la machine.

Quand prévoir un mécanisme de rotation ou de tie‑break dans la co gérance ?

La question revient souvent lors de la rédaction des statuts : faut‑il prévoir un mécanisme de rotation ou un co gérant arbitre ? Pour moi, la réponse dépend de la probabilité d’un blocage et du coût d’un arrêt d’activité.

Dans les entreprises commerciales à flux tendu, un point de bascule mal géré bloque la chaîne. Une clause de rotation simple, avec mandat temporaire et limites claires, permet de relancer la machine sans contester la légitimité de l’autre.

J’ai assisté un duo qui avait prévu une « présidence tournante » de six mois. Cela a créé de la clarté sur l’autorité opérationnelle et évité des disputes inutiles. Le secret : un calendrier public et des objectifs chiffrés pendant chaque période.

Clauses statutaires utiles pour le co gérant

Les statuts peuvent intégrer une multitude de clauses : seuils de signature, veto sur certaines opérations, modes de médiation, et même un arbitrage financier pour départs anticipés. Un co gérant bien protégé sait exactement quand agir et quand s’effacer.

Voici quelques clauses pratiques que je recommande systématiquement :

  • Seuils de signature financière clairs, indexés sur l’activité.
  • Mécanisme de médiation accélérée avant toute action judiciaire.
  • Modalités précises de révocation et d’indemnisation du gérant.

Chaque clause doit être rédigée dans un langage simple et précis. Les termes vagues donnent naissance aux interprétations opportunistes. Une relecture par un avocat aide à éviter les ambiguïtés coûteuses.

Fiscalité, garanties et engagements : ce que doit savoir chaque co gérant

Fiscalement, la situation varie selon le statut juridique et la répartition des rémunérations. Un co gérant doit anticiper l’impact sur l’impôt sur le revenu, les charges sociales et le résultat fiscal de la société.

En matière de garanties, les banques demandent parfois des engagements personnels ou des cautions. Ces demandes pèsent sur la relation entre co‑gérants : mieux vaut discuter des garanties avant de signer les contrats de prêt.

Autre point souvent négligé : l’assurance. La responsabilité civile des mandataires sociaux n’exclut pas les conséquences financières d’une mauvaise décision. Prévoir une police adaptée sécurise le patrimoine personnel de chaque co‑gérant.

Situation Conséquence fiscale Mesure recommandée
Co‑gérants majoritaires Régime TNS possible Estimer charges avant répartition des parts
Co‑gérants minoritaires ou salariés Assimilé salarié Clarifier rémunération et avantages en nature
Garanties bancaires demandées Responsabilité personnelle accrue Négocier plafonds et mutualiser garanties

Sortie, cession et gestion des impasses entre co gérant

Les sorties mal anticipées sont une source fréquente de litiges. Un co gérant doit savoir comment céder ses parts, à quel prix, et quelles sont les conditions de préemption prévues par les statuts.

En cas d’impasse, plusieurs options existent : médiation, expertise indépendante, rachat forcé selon une grille contractuelle, ou dissolution en dernier recours. Chaque solution a un coût opérationnel et émotionnel bien réel.

Procédures pratiques pour une sortie

Première étape : vérifier les clauses statutaires de préemption et d’agrément. Ensuite, solliciter une expertise indépendante pour fixer un prix objectif. Enfin, traverser la période de négociation avec des règles claires réduit la tension.

Dans une affaire récente, l’absence d’évaluation préalable a retardé la cession de six mois. La fixation en urgence d’un expert a dénoué la situation. Morale : prévoir la méthode d’évaluation dans les statuts évite des retards coûteux.

Checklist pratique avant d’accepter un rôle de co gérant

Avant d’accepter, chaque prétendant doit vérifier plusieurs éléments clés. Un co gérant prudent pose les bonnes questions à ses futurs associés et examine les documents fondateurs avec soin.

  • Lire intégralement les statuts et le pacte d’associés, s’il existe.
  • Vérifier la politique de rémunération et le régime social applicable.
  • Examiner les engagements bancaires et les garanties personnelles demandées.

Si un point n’est pas clair, demander une modification statutaire avant l’entrée. Les correctifs a posteriori sont toujours plus coûteux et parfois impossibles sans l’accord de tous.

Bonnes pratiques quotidiennes pour préserver la co‑activité

La routine de gouvernance protège autant que les statuts. Un co gérant efficace cultive trois habitudes : transparence financière, communication régulière, décisions documentées.

Tenir un journal des décisions et un registre des délégations aide lors d’un contrôle externe. Ces documents n’enchangent pas la confiance, mais ils réduisent l’impact d’un désaccord en fournissant des faits incontestables.

La formation continue compte aussi. J’incite les co‑gérants à suivre des modules sur la responsabilité civile, la compliance et la sécurité des données. Ces savoirs pratiques limitent les risques et renforcent la crédibilité.

Quand consulter un expert : timing et retour sur investissement

Un petit investissement juridique initial sauve souvent des mois de procédure. Consulter pour rédiger des clauses de sortie, ajuster des seuils financiers, ou rédiger un pacte d’associés est rarement inutile.

Ce que j’observe : les sociétés qui investissent 1 % de leur capital juridique gagnent en sérénité et en temps. Le coût est amorti par la réduction des frictions et la vitesse de décision accrue en période critique.

Faut‑il obligatoirement prévoir un pacte d’associés lorsque l’on a des co gérants ?

Non, ce n’est pas obligatoire, mais fortement recommandé. Le pacte complète les statuts avec des mécanismes privés comme la médiation, les clauses de rachat et des règles de gouvernance rapides.

Un co gérant peut‑il être tenu responsable des fautes de l’autre ?

Oui, la responsabilité peut être engagée pour faute personnelle ou pour décision collective. La prévention passe par une délégation formalisée et une assurance RCM pour mandataires sociaux.

Comment fixer un seuil de signature pertinent pour un co gérant ?

Aligner le seuil sur la trésorerie moyenne et les cycles commerciaux. Trop bas, il freine ; trop haut, il expose la société. Je conseille une revue annuelle pour ajuster au rythme de l’activité.

La révocation d’un co gérant est‑elle toujours possible sans motif ?

La révocation est en principe libre mais peut engager l’indemnisation si elle est abusive. Les statuts ou le pacte peuvent encadrer les motifs et les compensations pour éviter des litiges onéreux.

Peut‑on cumuler le statut de salarié et celui de co gérant ?

Oui, dans certaines situations. Le cumul dépend du pouvoir exercé et de la rémunération. La qualification entraîne des conséquences sociales différentes qu’il faut analyser au cas par cas.

Que faire si la banque exige une double signature et que les co gérants sont absents ?

Prévoir une délégation temporaire écrite et un mécanisme d’intérim dans les statuts. Sans cela, l’exploitation peut être paralysée ; une délégation signée et publiée facilite la continuité d’activité.

Derniers conseils avant de signer

Signer des statuts de co‑gérance est un acte à la fois juridique et humain. Prendre du temps pour écrire les règles, simuler des scénarios de conflit et prévoir des mécanismes de sortie réduit considérablement le risque stratégique.

Si vous hésitez entre une organisation mono‑dirigeante et une co‑gérance, pesez les bénéfices de la complémentarité contre la nécessité d’un cadre strict. Quand tout est planifié, le duo devient une force réelle et durable.

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Elise Bertrand
Élise Bertrand est la fondatrice et directrice de publication de Elles Réussissent, magazine B2B engagé et leader dans la valorisation des femmes entrepreneures et dirigeantes. Reconnue pour son dynamisme et sa détermination, Élise met en lumière les parcours inspirants, les initiatives innovantes et les nouveaux modèles de leadership au féminin dans l’écosystème professionnel.